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vendredi 11 octobre 2013

La Cour constitutionnelle russe restaure le droit d'être élu pour les personnes ayant été lourdement condamnées

Voir: http://pravo.ru/news/view/89420/

Hier 10 octobre, la Cour constitutionnelle de la Fédération de Russie vient de rendre une décision très attendue dans les milieux juridiques. En juillet 2012, le législateur a modifié les règles électorales: les personnes condamnées à plus de 10 ans de prison ne peuvent plus, à vie, se présenter à des élections, de quelque niveau que ce soit. Sur le recours de plusieurs personnes s'étant vu refuser par la commission électorale le droit de participer à des élections, la Cour constitutionnelle a déclaré cette disposition inconstitutionnelle.
 
Le représentant du Conseil de la Fédération estimait que l'interdiction est fondée car elle ne peut être individualisée et elle ne constitue pas une sanction supplémentaire à la peine prononcée. Pour leur part, les démandeurs s'appuyaient sur le fait que ce "filtre criminel", comme il est appelé, non seulement contrevient à la Constitution, mais également à l'art. 86.6 du Code pénal disposant que l'exécution ou la suppression de la peine annule toutes les conséquences juridiques qui lui sont liées.
 
La Cour constitutionnelle russe a pris le parti des demandeurs. Elle rappelle que s'il est effectivement important de limiter le droit d'être élu pour protéger des intérêts légitimes, la restriction de ce droit doit être proportionnée et permettre la réalisation du but fixé. Ce qui ici n'est pas le cas. La Cour rappelle également la position de la CEDH en la matière et la nécessité d'individualiser les modalités de restriction, en fonction de la personnalité du condamné, du type d'infraction, etc.
 
La Cour estime également que cette interdiction constitue bien une sanction supplémentaire à la peine prononcée. Le législateur est alors enjoint à modifier la loi sur les droits électoraux, pour introduire des mécanismes d'individualisation et de proportionnalisation de l'interdiction de participer à des élections.
 
Les débats parlementaires qui vont suivre ne manqueront certainement pas d'intérêt sur le fond, mais surtout en ce qui concerne la forme. Car le législateur va enfin être obligé de modifier sa méthode de régulation sociale: il n'est plus possible d'écraser une mouche avec un marteau-pillon, le législateur va devoir rechercher les moyens juridiques lui permettant d'atteindre le but qu'il s'est fixé avec un peu plus de finesse, ce à quoi il n'est pas habitué ces derniers temps.

jeudi 10 octobre 2013

Amestie en l'honneur des 20 ans de la Constitution: les femmes et les invalides

Voir: http://izvestia.ru/news/558513

Le Conseil des droits de l'homme avait reçu la demande du Président de préparer le projet de loi d'amnestie en vue des 20 ans de la Constitution. La tâche fut ardue, pour différentes raisons. Certains membres pensaient en terme de personnes (Pussy Riot, Bolotnaya...), alors que l'amestie à la différence de la grâce, ne concerne pas des personnes concrètes, mais des catégories. Un compromis semble avoir été trouvé. Si le projet est accepté par le Président, il devra être discuté devant la Douma, chambre basse du Parlement russe.
 
Finalement, les membres du Conseil des droits de l'homme proposent de porter leur attention sur deux catégories particulièrement faibles, les femmes enceintes ou ayant des enfants en bas âge et les invalides.
 
Le service fédéral d'exécution des peines estiment que, dans ce cas, 26 450 personnes pourraient être concernées, soit 2092 femmes et 24 358 invalides. Les chiffres semblent un peu trop importants pour être réalistes. Les députés de la Douma ont déjà prévenu que les libérations ne peuvent se faire sans un examen au cas par cas du dossier et que l'amnestie peut effectivement concerner les personnes condamnées pour des infractions qui ne sont pas des crimes et pour la première fois. Ce qui va fortement réduire le nombre réel de personnes suceptibles d'être libérées.
 
Dans l'ensemble du système pénitentiaire russe, se trouvent aujourd'hui privées de liberté  37 848 femmes.  1075 femmes sont enceintes, dont 557 en détention préventive.  1017 femmes incarcérées ont des enfants en bas âges, 880 d'entre elles sont incarcérées dans les prisons dont 13 possèdent des maisons de l'enfance et 137 vivent avec leurs enfants dans des villages de détention.
 
L'amestie pour les hommes d'affaire incarcérés pour des infractions économiques avait déjà provoqué une vague médiatique annonçant la sortie par milliers de ces prisonniers victimes du système, qui devaient alors relancer l'économie russe. Tel n'est evidemment pas le cas. Pour autant, l'amnestie reste nécessaire, même si elle ne va pas concerner des milliers, mais quelques centaines de personnes.

mercredi 9 octobre 2013

Le problème chronique de l'inexécution des décisions de justice en Russie

Voir: http://www.ng.ru/politics/2013-10-09/1_sudy.html

La question de l'exécution des décisions de justice est fondamentale pour n'importe quel système juridique, il en va de sa crédibilité. Or, les chiffres concernant le système russe laissent à désirer, ce dont les organes publics sont totalement conscients.
 
La Procuratura générale s'est adressée au département fédéral des huissiers de justice pour faire un état des lieux de la question de l'exécution des décisions de justice, vue l'ampleur du problème. A Moscou par exemple, la cour du niveau du Sujet de la Fédération enregistre un taux de 80% de décisions non exécutées. Et en cela elle est dans la moyenne nationale.
 
Pour 2013, il était prévu d'arriver à 50% d'exécution des décisions exécutoires. Au premier semestre 2013, le taux est de 28%. Cela explique notamment, que 50% des recours devant la CEDH déposés par des ressortissants russes concernent la non exécution de décisions de justice. Cela explique aussi pourquoi un arrêt pilote de la CEDH a été pris par la CEDH à l'encontre de la Russie sur la question, même si dans les faits peu de choses ont changées.
 
L'enjeu, pourtant, est de taille. La justice devenue monopole de l'Etat est venue remplacer la vengeance privée, pacifier les rapports sociaux. Mais pour que les gens ne se fassent pas justice eux-même, les décisions doivent être exécutées. Et pour que la population ait confiance dans ses tribunaux, les décisions prises doivent être exécutées. A ce sujet, un autre chiffre laisse rêveur, même si le parallèle est peut être un peu facile: 75% des russes n'ont pas confiance dans leur système judiciaire (Voir ici à la fin http://www.city-fm.ru/programs/issues/show/444383.html). Presque autant que de décisions non exécutées ...
 

mardi 8 octobre 2013

L'unification des Cours supérieures: un coup au clan Medvedev ou normalisation du système judiciaire?

Voir: http://newsru.com/russia/08oct2013/sud.html

Lancée avant l'été par V. Poutine, l'unification de la Cour suprême et de la Cour supérieure d'arbitrage commence à prendre forme. Le Président vient de déposer le projet de réforme constitutionnelle à la Douma et le schéma se met en place.
 
Il ne s'agit pas, en réalité, d'une unification qui permettra à chaque juridiction d'exister comme par le passé au sein d'une nouvelle configuration, mais bien de la remise en cause de l'autonomie institutionnelle des juridictions d'arbitrages, héritées de l'urgence des années 90 à mettre en place des tribunaux compétents en matière commerciale après la période soviétique. La Cour supérieure d'arbitrage n'existera plus, il ne restera que la Cour suprême, avec 170 juges.
 
Si le president actuel de la Cour suprême, V. Lebedev, est pressenti pour présider la nouvelle juridiction suprême, il semble que A. Ivanov n'y trouve pas de place. De même, tous les juges vont devoir être reconfirmés dans la nouvelle structure, ce qui va permettre un nettoyage interne. Pour effectuer la sélection, une commission spéciale de 27 personnes est mise en place, composée de représentants du Président, de la Chambre sociale et d'unions de juristes et de 24 représentants des assemblées régionales des magistrats. Une commission spéciale d'examen sera également mise en place qui sera composée de 11 personnes, dont 3 représentants de l'Union des juristes et 8 représentants des assemblées régionales des magistrats.
 
Pourquoi parle-t-on d'une attaque contre le clan Medvedev?
 
Tout d'abord, cela concerne la politique juridique de ces cours supérieures. La politique juridique lancée par Anton Ivanov à la tête de la Cour supérieure d'arbitrage était particulièrement favorable aux hommes d'affaires, qui trouvaient dans 60% des cas satisfaction à leurs recours contre les organes d'Etat. Cette politique particulièrement libérale ne faisait pas l'unanimité dans le corpus judiciaire, qui rappelait que A. Ivanov avait été bombardé président de la Cour supérieure d'arbitrage à 39 ans, sans jamais avoir auparavant exercé même une seule journée le métier de juge.
 
Il est donc fort possible que la politique judiciaire de la nouvelle Cour suprême modifie légèrement les règles du jeu. D'autant plus, que le processus de nomination dans la nouvelle formation judiciaire va permettre d'écarter également les hommes de A. Ivanov. Or, tout ce groupe est très lié à D. Medvedev. Ivanov et Medvedev ont fait leurs études ensemble, ont terminé la même faculté de droit en même temps, ce qui a donné un sérieux coup de pouce à Ivanov. Ce qui, par ailleurs, est très mal pris par les magistrats, qui veulent restaurer une logique corporative et permettre l'ascention interne.
 
Les implications de la réforme: indépendance et normalisation
 
Cette réforme, par ailleurs, se double d'une réforme du mode de nomination des procureurs. Le journal Vedomosti, étrangement, alors que de tendance libérale, semble soutenir le système actuellement en place, qui est l'héritage de la logique soviétique. Il s'agit maintenant, sur proposition du Conseil de la Fédération (chambre haute du Parlement), de proposer les candidatures du Procureur général de la Fédération de Russie, de ses vices et des procureurs généraux des régions. Ces candidatures sont ensuite officiellement entérinées par décision du Président russe. Aujourd'hui, le système de la Procuratura est purement vertical, dans un pays de structure fédérale. Il s'agit ici d'un renforcement de l'indépendance des procureurs, n'en déplaise certains collègues. Je m'explique: les vices-procureurs ne seront plus dépendants du Procureur général fédéral, les procureurs des régions auront un chef à quelques milliers de kilomètres parfois, au lieu de l'avoir dans le bureau à côté. Donc, les possibilités de mécanismes de pression en seront d'autant diminuées et les mécanismes de responsabilité pourront devenir plus efficace, car la chaîne du lien hiérarchique se réduit.
 
Pour finir, cette réforme de l'organisation judiciaire russe est plus que nécessaire. L'organisation actuelle a montré ses limites avec la pratique et les nombreux conflits de compétence entre la Cour supérieure d'arbitrage et la Cour suprême, les problèmes de lobbying auprès de cette Cour d'arbitrage, juridiction spéciale pour les hommes d'affaires. Plus qu'une attaque contre le clan Medvedev, plus qu'un combat politicien interne, une telle réforme est surtout empreinte de bon sens et vise à une normalisation du système judiciaire russe, à sa "modernisation" pour reprendre le terme tant apprécié par l'ancien Président Medvedev.

lundi 7 octobre 2013

La Russie face à l'islamisme radical

Voir: http://www.rosbalt.ru/video/2013/10/03/1183106.html

Ces derniers temps, la Russie a renforcé sa politique de lutte contre l'immigration clandestine, ce qui fut salué par une grande partie de la population du pays, et tente de lancer un mouvement visant à favoriser l'emploi de citoyens russes, voire de différentes régions, plutôt que de recourir à la main d'oeuvre bon marché venant des républiques voisines. Il semblerait que cette politique ne plaise pas à tout le monde.
 
Le 27 septembre, à côté de la station de métro Otradnoe à Moscou, à proximité de la mosquée, a eu lieu une manifestation non autorisée d'islamistes radicaux. Ils considèrent la politique menée par la Russie comme une déclaration de guerre contre les mulsulmans et l'Islam, appellent au soutien de leurs combattant en Tchétchénie, en Syrie et en Afganistan. Et, surtout, appellent de leurs voeux à l'instauration d'un Califat islamiste en Russie, pour lutter contre cet Etat, qui n'est pas amical avec leur communauté.
 
Le choc des cultures est présent en Russie, comme il l'est dans tous les pays. Les donnés du problème changent simplement en fonction du choix de politique fait par l'Etat. Si la Russie est un Etat multiconfessionnel, elle entend protéger ses racines chrétiennes face à la montée de l'Islam et ne pas permettre l'assimilation de la croyance en une réligion avec l'utilisation de la radicalité celle-ci à des fins politiques. C'est le choix fait par la Russie, et elle l'assume. Même s'il diffère en de nombreux points des politiques menées en Europe. Car la liberté du culte ne doit pas conduire au renoncement de ses racines culturelles. Et le respect de l'autre ne peut s'accompagner du dénigrement de soi. La tolérance est une relation, elle nécessite deux sujets.