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vendredi 26 mai 2017

Comment protéger la jeunesse contre la manipulation politique?



Les derniers mouvements à tendance révolutionnaire ont un point commun: l'utilisation, voire la manipulation, de la jeunesse. Qui dans ses années étudiantes n'a pas participé à une manif? Difficile à imaginer. Qui n'a pas voulu changer le monde? Qui n'a pas défié la police, s'imaginant dans la peau de David conte Goliath, la peur au ventre et le coeur en fête? Peu importe, si l'on n'est pas romantique à 16 ans, on ne l'est jamais. Si l'on ne verse pas de larmes à 16 ans sur les mots de Chateaubriand, une vie bien sèche s'annonce. Mais les temps ont changé et l'émotion provoquée par les post sur Facebook n'ont pas le même effet. La Russie cherche un moyen pour protéger sa jeunesse, mais la pente est glissante. 


La moyenne d'âge dans le Maïdan ukrainien était très basse, de même lors des manifestations organisées par Navalny contre Medvedev sous couvert  de lutte contre la corruption (voir note article sur la tentative de Révolution verte lancée par Navalny). Le Conseil des droits de l'homme s'est inquiété des appels à manifester directement adressés aux écoliers, de cette technique de manipulation de leur nature émotive à des fins très particulières.

La ministre de l'enseignement affirme que les jeunes doivent rester en dehors de la politique, qu'ils ne comprennent pas par ailleurs. Suite aux manifestations de mars, une étude a été faite chez les écoliers pour savoir s'ils comprenaient au moins ce que signifie le concept de corruption, contre lequel ils étaient sortis dans la rue. 70% d'entre eux n'ont pas été capables d'en donner la moindre définition.

Donc la question étant: pour quoi les enfants manifestaient si nombreux dans la rue?

Tout d'abord, parce que les organisateurs ont fait un excellent travail sur les réseaux sociaux pour les inciter à participer "à un grand mouvement qui va changer le monde, le rendre meilleur". Qui, à cet âge, n'a pas envie de changer le monde? 

Ensuite, parce que la société actuelle voue un véritable culte à l'enfant génie de par sa naissance, qui a une connaissance innée que le professeur (qui doit obligatoirement ête jeune lui aussi) ne fait que révéler. Les émissions s'enchaînent en Russie à propos de tous ces enfants qui ont des dons incroyables: ils sont capables de ressortir par coeur des connaissances qu'ils ne maîtrisent pas. Mais on ne leur demande pas de les maîtriser, on leur demande de faire le show - pour les adultes. Notre société a, en quelque sorte, remplacé les chiens savants par les enfants savants. En même temps, elle leur accorde une place qu'ils ne peuvent tenir, qui est trop lourde pour leurs épaules encore fragiles. Les enfants ne sont pas là pour faire fantasmer les adultes, pour vivre virtuellement la vie qu'ils n'ont pu se construire dans leur réalité. 

Nous assistons à ce double mouvement, à la fois d'infantilisation par la déresponsabilisation réelle des adultes et le vol de l'enfance en traitant les enfants comme des êtres supérieurs, par un transfert opéré des adultes sur les enfants. Ce processus destructeur fragilise en profondeur les individus, les rendant également plus facilement maléables ... manipulables.

La Russie cherche un moyen de protéger les jeunes. Il ne serait pas mauvais de commencer par mettre un terme à ces émissions télévisées exploitant l'image de l'enfant, de prendre avec plus d'humour tous ces centres pour "surdoués" dont l'aspect commercial du projet n'est pas forcément étrangé à leur réussite et de s'intéresser avant tout à l'école. C'est certes banal et beaucoup moins vendeur que Syrius ou autres programmes post-modernes, mais à long terme l'école est le seul rampart de l'enfance contre l'absurdité du monde adulte. 

En attendant le long terme, la Douma s'interroge sur le court terme et la discussion porte sur l'interdiction de participation des jeunes aux manifestations non autorisées, au minimum pour qu'ils ne soient pas utilisés comme rampart humain par les adultes organisateurs. En ce qui concerne les mineurs, c'est juridiquement faisable, mais pour les jeunes majeurs cela semble irréaliste. Les parents seraient alors soumis à une responsabilité administrative (une amende). Il est évident que ce projet de loi n'est pas prévu pour sanctionner en masse les parents, mais pour fixer la ligne de ce qui est autorisé et de l'interdit dans la société. Après les parents prennent leur responsabilité, ils peuvent expliquer - ou non - à leur enfant les règles sociales. Mais ces règles existent. 

La question de la responsabilité des organisateurs doit être traitée à part. Le danger est ici. Ils utilisent certes les faiblesses du système: la destructuration du système éducatif sous l'impulsion des recommandations de l'OCDE; le culte de l'individu connecté en permanence - comme un animal en laisse; le culte de la jeunesse omnipotente et de l'âge mûr décadent et dépassé; le culte de l'éternel adolescent; etc. Les adultes qui incitent les enfants à sortir dans la rue pour "défendre" des causes, dont ils ne maîtrisent pas les enjeux réels, sont les véritables tireurs de ficelles sociales. 

Mais comment réagir? Les enfants doivent rester en dehors de la politique, mais la tentation de la transgression de l'interdit est normale, et même nécessaire, dans le processus de construction de l'individu. Tout comme la rencontre douloureuse avec la limite, le non. La loi peut-elle aider à fixer cette barrière? Seulement dans le cadre d'une réflexion générale sur la dégradation des rapports humains dans notre société.

5 commentaires:

  1. Je ne pense pas, en tant qu'ancienne instit, que l'école soit le seul rempart, une grande partie de l'éducation devrait être faite par la famille qui n'en a pas le temps, qui est déstructurée, souvent elle-même déphasée par l'environnement contemporain antinaturel. L'école et la famille réunies se trouvent aussi confrontées à cet environnement, puissant et envahissant par ses tentations et son formatage médiatique des esprits. Personnellement, je prône la foi, la religion, les traditions, y compris SA propre tradition populaire et pas celles, mal digérées, du monde entier. J'ai expérimenté cela à une très petite échelle, les enfants que j'ai eu lorsqu'ils avaient 4 et 5 ans m'écrivent parfois, alors qu'ils sont adolescents, pour me remercier de ce que cela leur a apporté.

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  2. Entièrement d'accord . Et il faut compléter cela par de solides organisations de jeunesse , contrôlées par l'Etat , et capables de permettre à la "libido" des jeunes , au sens psy , de s'exprimer pleinement et d'une façon constructive .Cela est impossible ds une démocra"SS"ie libérale à l'occidentale , mais ds une démocratie "autoritaire" , entendez , qui a une colonne vertébrale , si . Puisse Valdimir avoir encore assez de force morale et intellectuelle pour empêcher durablement la Russie de tomber dans le cloaque (le "purin de l'occident" disait Soljénytsyne) d'une société anomique comme la nôtre , et en train de se faire remettre en ordre par l'Islam , car la nature a horreur du vide ....
    A Laurence Guillon : j'ai regardé vos dernières videos sur votre site "pereslav" . Moi qui adore le chant polyphonique , profane ou "sacré" , chose qu'il devient de plus en plus difficile de vivre , tant les gens sont abîmés par la sousculture yankee , j'ai éprouvé une vive émotion en voyant ces gens simples unis dans la communion de la polyphonie traditionnelle . C'est aussi pour ça que nous aimons la Russie et que les salopards qui oppriment nos peuples depuis tant de décennies la détestent .

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  3. La jeunesse russe est encore la moins menacée de crétinisme, grace à son riche passé et ce miraculeux( faut le dire) Poutine. Cela dit la barre est haute, très haute, car la séduction ne se fait pas par la politique mais par le chant de sirène des gadgets électroniques, fesse-book(ne corrigez pas) et autres débilités judéoanglosaxonne.

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  4. Très, très, compliqué, Karine! Travaille de longue haleine et la dynamique pour l'instant n'est pas de côté des " adultes lucides" que nous sommes:) surtout ici en France.

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  5. J'aurais plutôt choisi comme titre "Comment nous protéger de la jeunesse politiquement manipulable "
    "Nous", c'est à dire nos si fragiles démocraties, ou ce qu'il en reste !

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